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« Agnès Mellon prend les choses de travers et c’est ce qui fait son caractère. Non dans la vie, mais en matière de photographie. N’essayez pas de la convaincre d’user d’un traditionnel plan large, ni même d’aborder son sujet par le droit. Non, son truc à elle, c’est le biseauté, le penché, le désaxé, fruit de ce pas de côté qui contribue à révéler les choses sous un autre angle. Tout, dans le travail d’Agnès Mellon, est une affaire de point de vue. Chacun de ses clichés ramène à ce qui fonde le photographe, à cet « œil » qui, au-delà de la technique, lui permet de transcender son métier en art. Qu’elle s’attache aux scènes de danse ou aux spectacles des villes, la photographe marseillaise traque le vrai derrière le fabriqué, privilégie le spontané à l’élaboré. Quel que soit le théâtre où son objectif opère, sa démarche reste la même : se laisser surprendre par ce qu’elle trouve, et non trouver ce qu’elle vient chercher. C’est cette approche sans préméditation qui confère à ses images leur puissance d’évocation et d’émotion. Jouant de la mise en parallèle, du champ et du contre-champ, ses expositions offrent au spectateur une place à part entière. À lui de recomposer, de relier, de combler les vides par le plein de son imagination. De porter à son tour, par le processus réflexif inhérent à la photographie, un regard sur le monde, sur les autres, sur lui. »

Laurence Perez (WMAG, décembre 2015)

 

« Les regards d’Agnès


Je n’ai pas été immédiatement séduite par les photos d’Agnès Mellon. Son regard sur la danse différait trop du mien : elle me donnait à voir les corps de près, là où ils transpirent, s’essoufflent, où les veines se gonflent, où les chairs se dévoilent sans sensualité, par l’effort qu’elles fournissent à produire des gestes.
Mais mon agacement face à la subjectivité affichée d’Agnès Mellon se doublait, je dus l’admettre, d’une fascination : ces photos-là m’ouvraient des portes, montraient des êtres, refusaient la froideur du papier glacé, des cadrages raisonnés, de la netteté idéale. Quelque chose dans ces images capturait mon œil.
En persistant je compris : derrière chaque corps se dessine un fantôme qui ravit le regard. Un reflet sur le sol, une ombre, un homme qui passe, un épieur tapi, un double, des sosies effacés qui, au lointain, affirment qu’il existe une perspective, un autre espace. Celui justement que mon œil usuel ne voit pas, s’attachant aux mouvements clairs de l’avant-scène, aux angles objectifs, à l’idée d’ensemble, aux pas exhibés.
Ainsi la photo d’Agnès Mellon a changé mon regard ; nous nous séparons encore à l’entrée des spectacles: elle s’installe devant, au coin, élaborant des angles, visant les chairs ; je me place plus loin, de face, et cherche à percevoir une globalité illusoire. Mais à la fin nous nous racontons toujours ce que nous avons vu… »

Agnès Freschel

 

« Danse immobile


Pourquoi faire de la photo lorsqu’on est éprise de mouvement ? Il n’y a apparemment rien de plus statique, de plus figé qu’une photo !
Apparemment… parce qu’avec Agnès Mellon, la photo sort de son immobilité, s’extrait de ce figé pour l’éternité. A l’instant où le temps suspend son vol, elle saisit le bras qui s’élance, le pied qui s’enfonce dans le sol, l’émotion des mains qui se crispent. Elle s’imprègne des pauses et des silences, comme pour mieux souligner les contours du geste… Elle ose l’impudeur même pour aller au plus près, pour se fondre dans la goutte de sueur, dans la souffrance de l’étirement.
Aller jusqu’au bout, oser inventer de nouvelles extrémités… c’est une façon de nous sortir des clichés, des regards convenus, de nous dévoiler la vie, dans sa gestuelle, dans son présent, dans ce qu’elle a de plus insaisissable et de plus invisible… »
Karine Jamen

 

Art sweet Art a le plaisir de présenter une nouvelle collaboration avec la photographe Agnes Mellon.

Photographe de spectacle vivant spécialisée en danse, Agnès Mellon capte les corps en mouvement avec la spontanéité et la précision d’un artiste en studio. Clair-obscur, ligne claire, l’intensité brute et subtile des silhouettes mobiles soudain figées dans une posture intense et hiératique évoque le naturalisme de Caravage, le mysticisme de Zurbaran.

 

Sylvie Bonnet